lundi 20 juillet 2009

Que penser du projet ITER?

Le projet ITER est une action internationale qui doit permettre à terme de produire de l'énergie de manière quasi illimitée à partir de la fusion de noyaux d'hydrogène. D'une manière simplifiée, on souhaite reproduire sur terre ce qui se passe dans le soleil et les étoiles.

Cette aventure scientifique et technologique doit faire face à de nombreuses difficultés quasiment insolubles techniquement et scientifiquement. Du point de vue de la science se pose le problème de la stabilité du plasma, et technologiquement il faut résoudre le problème important des matériaux constitutifs de la chambre contenant le réacteur. Enfin, et non des moindres est le coût final du kilowattheure produit, aucune estimation n'est faite de ce côté là.

Depuis Einstein, on sait que l'on peut transformer de la matière en énergie, c'est la fameuse relation : E=mc2. Cette théorie a été appliquée avec succès d'une part avec les réacteurs nucléaires, et malheureusement aussi avec la bombe atomique puis la bombe H. Cette dernière fonctionne sur le même principe de fusion de noyaux d'hydrogène. Bien qu'on sache faire des bombes, on ne sait pas contrôler ce mécanisme de fusion.

Alors que les réacteurs nucléaires qui fonctionnent depuis plus de 60 ans ont étés "faciles" à développer. Il a suffit de mettre en contact une quantité suffisante de matière fissile, en général de l'uranium enrichi pour produire de la chaleur transformée ensuite de manière classique en électricité. Il en est allé tout autrement dans le cas de la fusion. Depuis plus de cinquante ans on essaie de maîtriser cette technologie. Pour cela diverses solutions ont été proposées, et celle qui a obtenu le plus grand succès est celle du Tokomak. Il s'agit d'une gigantesque enceinte à vide en forme de tore, c'est à dire une sorte de chambre à air géante, maintenue sous un vide très poussé. A l'intérieur de cette chambre on introduit un mélange de deutérium et de tritium, deux isotopes de l'hydrogène. Le premier est naturel, et l'autre est radio-actif avec une demi vie de 12 ans. Pour que les noyaux de ces deux isotopes fusionnent, il faut chauffer ce mélange à des températures supérieures à plusieurs centaines de millions de degrés.

Évidemment aucun métal ne peut résister à de telles températures. Pour cela le Tokomak permet grâce à des champs magnétiques de maintenir le mélange sous la forme d'un plasma au centre de la chambre, sans contact avec les parois de la machine.

ITER en construction au Centre Nucléaire de Cadarache est l'étape qui devrait permettre de montrer qu'il va être possible d'obtenir à la fois ces températures élevées, et en même temps une densité élevée. Au cours des dizaines d'années qui viennent les chercheurs vont essayer de contrôler le plasma de deutérium et tritium avec des températures de plus en plus élevées, des densités et des durées les plus grandes possibles.

Quels sont les problèmes qui doivent être résolus? Ils sont de deux catégories: d'une part scientifique, il faut obtenir les conditions décrites au paragraphe précédent, mais d'autre part il faut aussi que techniquement le projet soit viable.

Du point de vue scientifique, les difficultés sont nombreuses. Il est difficile de réaliser simultanément les trois conditions décrites précédemment: température, densité et durée élevées. dans les expériences précédentes, on a pu atteindre pendant de courtes durées des températures élevées, mais avec une densité insuffisante pour que la réaction nucléaire déclenchée produise plus d'énergie que l'énergie électrique nécessaire à faire fonctionner la machine. ITER ne sera qu'une étape pour apprivoiser le plasma à haute température, et forte densité. C'est un défi que personne à ce jour ne peut garantir qu'il sera réussi, mais c'est ainsi que va la science, on ne peut pas tout prévoir avant de faire l'expérience.

Côté technologique la situation est également très complexe. D'une part il y a le problème de la tenue des matériaux sous un flux de neutrons extrêmement important. Effectivement la réaction deutérium plus tritium produit de l'hélium, gaz inoffensif, mais aussi des neutrons très énergétiques, beaucoup plus que ceux des centrales nucléaires actuelles. Il n'existe pas à ce jour de matériau qui tienne de tels flux. Il est prévu au Japon la construction d'une expérience permettant de tester ces matériaux, mais pour l'instant les travaux n'ont pas encore commencé. Bien qu'il y ait peu de radioactivité dans ITER, il y en aura quand même, d'une part à cause du tritium qui y est mis, et d'autre part à cause des réactions produites par les neutrons sur les parois de la machine. Le Tokamak sera donc contaminé, et en cas de panne, il faudra intervenir avec des robots.

Autre point important, le combustible. Le deutérium existe à l'état naturel, et on peut l'extraire facilement et économiquemen de l'eau de mer. Par contre le tritium est radioactif, et il faut le fabriquer. Pour le démarrage on pourra utiliser ce qui est produit dans des centrales nucléaires, mais dans l'avenir, l'idée est de le produire sur place. L'idée est d'entourer la machine de lithium le métal le plus léger qui existe, et une fois bombardé par les neutrons, celui-ci va se transformer en tritium. Il faudra construire sur place un système de séparation du tritium pour le réinjecter dans le plasma.

Dernier point important. Pour que le rendement global de la machine soit rentable, il faudra que les réactions nucléaires produisent 60 fois plus d'énergie que celle qui est mise pour la faire fonctionner. On est encore loin du compte, mais rien n'est impossible. On peut quand même se demander s'il sera possible un jour de fabriquer une centrale de ce type avec un coût du kilwatt heure compétitif?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Archives du blog